Chose rarissime, le menu du jour ne se compose pas de terrine de zombie incrustée de lames de scalpels, on ne dînera pas aux sons de tronçonneuses. Le groupe que je tente ici de vous présenter est même situé à des années lumières du royaume du Metal. Pourquoi en parler dans les pages de VS? Simplement parce que <Ö> et sa musique vaporeuse mérite largement que l'on y pose une oreille curieuse, avide de talent et d'originalité.
Et pis d'abord si vous êtes pas contents, les 11.318 [VS Hubert Alaisse!] kroniks de VS vous donneront un peu de lecture avant de ramener votre fraise! Héhé!
<Ö> dévoile ici un premier album aussi singulier que prenant et aérien. Il serait délicat d'accoler une quelconque étiquette à la musique de ce groupe français tant il sort des sentiers battus. Naviguant entre les brumes d'un Post Rock raffinée et celles d'un Doom flottant dans une atmosphère onirique, <Ö> ouvre les portes d'un monde déroutant et mélancolique. Pas de batterie, pas de chant, pas d'effet artificiel, "Okul" parvient à créer une œuvre unique grâce à la seule présence d'une simple guitare électrique qui distille avec parcimonie des arpèges décousus… planants… De pures caresses auditives qui permettent à l'esprit d'aller hanter les contrées lointaines et morbides qui bordent le Léthé.
Organique comme peut l'être l'Americana, magistralement Dronesque et fantomatique comme l'est le Doom… On reste la mâchoire sur les genoux en découvrant cette prod' aux accents spectraux et au grain de son suave et entêtant.
<Ö> mélange des saveurs variées et réussit à croiser une musique minimaliste à une atmosphère empesé parfois lugubre qui flirte avec des relents d'Ennio Morricone. En se laissant emporter par "Okul", on se retrouve dans l'ambiance étrange et surréaliste d'une ville fantôme. Certains songeront à la BO du magnifique film de Jim Jarmusch – "Dead Man" - signée de la main de Neil Young. Arpèges sinueux, atmosphère lunaire, déconstruite mais toujours éblouissante de finesse et de sophistication. La guitare vibre, souffle des nappes envoûtantes et effleure des notes qui tombent des sphères comme autant de goutte d'ambroisie. Parfois l'onde calme des sept titres s'agite de remous plus claquants, la tension monte et éclate en de cinglantes envolées d'une force étonnante… Ces reflets XP – voire Dronesques - offrent un relief tout particulier à l'ensemble de la galette. D'ailleurs, si ces montées en intensité ne serpentaient pas "Okul", les 40 minutes du disque glisseraient du contemplatif au soporifique…
Sombres et intimistes, glaciales et poussiéreuses les sept "chansons" de ce disque sont de véritables merveilles. On ne ressort pas totalement indemne de cet album, on se plonge entièrement dans les méandres de cette petite pépite. On l'écoute les yeux fermés pour mieux voir les scènes d'un film imaginaire. La qualité de ce groupe est évidente, il se voit comme le pif au milieu de la tronche de Pascal Brutal!
La bande-son de l'après-Apocalypse.
<Ö> ne trouvera sans doute pas grâce aux oreilles de la majorité… trop, beaucoup trop extrême pour des tympans de metalleux!
Je passe le stylo au camarade Seb <Ö>n Fire dont l'érudition cinéphile écrabouille la mienne!
Seb <Ö>n Fire
Comme l’a si bien dit mon collègue reptile, point de growls ni de gruiik chez <Ö>. Encore moins de moshparts de bâtards et de chœurs de bûcherons. Pourquoi parler de cet album alors ? Parce que par bien des aspects, il se rapproche d’un univers souvent apprécié et évoqué dans le milieu metal. Pourquoi nous, amateurs de tripailles fraîches et de battes de baseball ? Parce que nous sommes des gens de goût.
Plus que musicales, les influences de <Ö> (prononcé « oga ») sont carrément cinématographiques. Le titre d’ouverture, qui donne son titre à l’album, « Okul » évoque immédiatement les Goblins, compositeurs attitrés des meilleurs Argento entre bien d’autres choses. Ce titre court développe des ambiances surnaturelles et tendues à l’aide de quelques beats électroniques savamment distillés autour d’une guitare aérienne. Ce titre évoque aussi Zombi, groupe partageant les mêmes influences que les Frenchies d’<Ö>. Les titres suivants rappellent le travail de Bruno Nicolai ou d’Ennio Morricone de par leur utilisation de la guitare. Des notes étirées, arides, créant une tension palpable et une impression de voyager dans de grands espaces désolés. On ne peut s’empêcher de penser à l’Homme à l’Harmonica, des yeux de Charles Bronson, de la chaleur écrasante, d’Henry Fonda et de ces notes de grattes grinçantes comme un gémissement de coyotes. La musique de ce one man band est avant toute chose évocatrice et peut aisément s’appréhender comme le score d’un film imaginaire mélant western, post-apo italien, anticipation et post nuke à la Castellari. Si « Les Guerriers du Bronx » avait été un vrai bon film, « Okul » aurait pu sans problème être sa B.O. Avec un petit côté arty en plus.
D’autres titres encore, comme « Sad&Empty », rappellent le travail sonore de John Carpenter et le côté désabusé de certains de ses plus grands scores. D’excellentes influences donc pour une musique qui parvient à dépasser le simple hommage pour construire un univers finalement assez personnel et une belle pièce de musique qu’on vit plus qu’on écoute. Placez un casque sur vos oreilles, fermez les yeux et laissez-vous embarquer, vous verrez l’effet est saisissant. Je ne vais pas paraphraser la prose de mon confrère reptilien, mais l’idée est la même.
<Ö> convie aussi John Murphy, compositeur de « 28 Jours Plus Tard » entre autres, à la fête de par son utilisation de petite nappes de guitares électriques reléguées en arrière-plan sonore pour venir habiller le son et donner une vraie impression de danger sous une ambiance avant tout atmosphérique et planante qui évoque le travail de Nick Cave sur l’excellent western qu’est « La Proposition » ou celui de Johnny Greenwood (du groupe Radiohead) sur « There Will Be Blood » le chef-d’œuvre de P.T Anderson. On pense parfois aux velléités expérimentales de Gyorgy Ligeti aussi. C’est dans toutes ces eaux cinéphagiques que navigue <Ö>, qui mêle tout cela avec une facilité et un sens de la musique indéniable. Car une des forces de Okul est de toujours apporter une sensation de danger latent et de menace imminente dans un univers a priori calme, planant et contemplatif, créant ainsi chez l’auditeur un malaise palpable et indéfinissable. La musique d'<Ö> fait penser à plein d'autres choses encore mais assez de name dropping comme ça. Écoutez et faites-vous votre propre idée, les amateurs de la frange la plus planante du post rock ne seront pas déçus du voyage.
Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'une chronique comme ça donne envie!!
Je fonce...
Floyderz Membre enregistré
Posté le: 10/08/2010 à 12h06 - (86031)
Euh..pareil, la Kro m'a donné envie de me jeter sur le Myspace. Sauf que là, ben non quoi...
Désolé, je rentre pas dans la démarche et ça ne me parle pas 2 sec. Je suis pourtant assez client de ce genre de truc d'hab'. Mais là...
black thoughts Membre enregistré
Posté le: 10/08/2010 à 14h00 - (86037)
Idem, ça ne trouve pas grâce à mes yeux. Je devrais peut-être aller voir l'Okuliste.
Ennemi IP:85.69.85.214 Invité
Posté le: 10/08/2010 à 14h50 - (86039)
Très vide. Trop vide. Il n'y a rien de postrock dans ce truc non plus. Dommage je m'attendais a plus, a mieux. Trop de silence, ça ne vaut pas les quelques groupes qu'il a en topfriend sur son myspace...
Cobra Commander Membre enregistré
Posté le: 10/08/2010 à 15h30 - (86042)
cépadénazi?
black thoughts Membre enregistré
Posté le: 10/08/2010 à 15h53 - (86043)
Allez, pour te faire plaisir Cobra !
cédénazi laule
Monceau Membre enregistré
Posté le: 10/08/2010 à 22h53 - (86056)
Cobra ! je soupçonnais pas tant de tendresse sous cette carapace du grand méchant de VS ^^
je bavais pendant tout le trajet sur mes voisins de la rame de metro ce matin. Mais finalement je crois que j'aurai plus de chance d'apprécier ton service suivant composé de "terrine de zombie incrustée de lames de scalpels" que ce met fin mais tellement étrange que je peux me comporter en touriste européenne ayant tout juste gouté une grosse punaise frite sur les étale du marché asiatique : "ouais j'ai gouté, c'est ... particulier"
XXuK Membre enregistré
Posté le: 23/08/2010 à 13h50 - (86315)
J'aime beaucoup cet album qui n'est pas sans me rappeler un Harvestman ou une BO type Deadman.
J'aime beaucoup cet album...
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Chose rarissime, le menu du jour ne se compose pas de terrine de zombie incrustée de lames de scalpels, on ne dînera pas aux sons de tronçonneuses. Le groupe que je tente ici de vous présenter est même situé à des années lumières du royaume du Metal. Pourquoi en parler dans les pages de VS? Simplement parce que <Ö> et sa musique vaporeuse mérite largement que l'on y pose une oreille curieuse, avide de talent et d'originalité.
Et pis d'abord si vous êtes pas contents, les 11.318 [VS Hubert Alaisse!] kroniks de VS vous donneront un peu de lecture avant de ramener votre fraise! Héhé!
<Ö> dévoile ici un premier album aussi singulier que prenant et aérien. Il serait délicat d'accoler une quelconque étiquette à la musique de ce groupe français tant il sort des sentiers battus. Naviguant entre les brumes d'un Post Rock raffinée et celles d'un Doom flottant dans une atmosphère onirique, <Ö> ouvre les portes d'un monde déroutant et mélancolique. Pas de batterie, pas de chant, pas d'effet artificiel, "Okul" parvient à créer une œuvre unique grâce à la seule présence d'une simple guitare électrique qui distille avec parcimonie des arpèges décousus… planants… De pures caresses auditives qui permettent à l'esprit d'aller hanter les contrées lointaines et morbides qui bordent le Léthé.
Organique comme peut l'être l'Americana, magistralement Dronesque et fantomatique comme l'est le Doom… On reste la mâchoire sur les genoux en découvrant cette prod' aux accents spectraux et au grain de son suave et entêtant.
<Ö> mélange des saveurs variées et réussit à croiser une musique minimaliste à une atmosphère empesé parfois lugubre qui flirte avec des relents d'Ennio Morricone. En se laissant emporter par "Okul", on se retrouve dans l'ambiance étrange et surréaliste d'une ville fantôme. Certains songeront à la BO du magnifique film de Jim Jarmusch – "Dead Man" - signée de la main de Neil Young. Arpèges sinueux, atmosphère lunaire, déconstruite mais toujours éblouissante de finesse et de sophistication. La guitare vibre, souffle des nappes envoûtantes et effleure des notes qui tombent des sphères comme autant de goutte d'ambroisie. Parfois l'onde calme des sept titres s'agite de remous plus claquants, la tension monte et éclate en de cinglantes envolées d'une force étonnante… Ces reflets XP – voire Dronesques - offrent un relief tout particulier à l'ensemble de la galette. D'ailleurs, si ces montées en intensité ne serpentaient pas "Okul", les 40 minutes du disque glisseraient du contemplatif au soporifique…
Sombres et intimistes, glaciales et poussiéreuses les sept "chansons" de ce disque sont de véritables merveilles. On ne ressort pas totalement indemne de cet album, on se plonge entièrement dans les méandres de cette petite pépite. On l'écoute les yeux fermés pour mieux voir les scènes d'un film imaginaire. La qualité de ce groupe est évidente, il se voit comme le pif au milieu de la tronche de Pascal Brutal!
La bande-son de l'après-Apocalypse.
<Ö> ne trouvera sans doute pas grâce aux oreilles de la majorité… trop, beaucoup trop extrême pour des tympans de metalleux!
Je passe le stylo au camarade Seb <Ö>n Fire dont l'érudition cinéphile écrabouille la mienne!
Seb <Ö>n Fire
Comme l’a si bien dit mon collègue reptile, point de growls ni de gruiik chez <Ö>. Encore moins de moshparts de bâtards et de chœurs de bûcherons. Pourquoi parler de cet album alors ? Parce que par bien des aspects, il se rapproche d’un univers souvent apprécié et évoqué dans le milieu metal. Pourquoi nous, amateurs de tripailles fraîches et de battes de baseball ? Parce que nous sommes des gens de goût.
Plus que musicales, les influences de <Ö> (prononcé « oga ») sont carrément cinématographiques. Le titre d’ouverture, qui donne son titre à l’album, « Okul » évoque immédiatement les Goblins, compositeurs attitrés des meilleurs Argento entre bien d’autres choses. Ce titre court développe des ambiances surnaturelles et tendues à l’aide de quelques beats électroniques savamment distillés autour d’une guitare aérienne. Ce titre évoque aussi Zombi, groupe partageant les mêmes influences que les Frenchies d’<Ö>. Les titres suivants rappellent le travail de Bruno Nicolai ou d’Ennio Morricone de par leur utilisation de la guitare. Des notes étirées, arides, créant une tension palpable et une impression de voyager dans de grands espaces désolés. On ne peut s’empêcher de penser à l’Homme à l’Harmonica, des yeux de Charles Bronson, de la chaleur écrasante, d’Henry Fonda et de ces notes de grattes grinçantes comme un gémissement de coyotes. La musique de ce one man band est avant toute chose évocatrice et peut aisément s’appréhender comme le score d’un film imaginaire mélant western, post-apo italien, anticipation et post nuke à la Castellari. Si « Les Guerriers du Bronx » avait été un vrai bon film, « Okul » aurait pu sans problème être sa B.O. Avec un petit côté arty en plus.
D’autres titres encore, comme « Sad&Empty », rappellent le travail sonore de John Carpenter et le côté désabusé de certains de ses plus grands scores. D’excellentes influences donc pour une musique qui parvient à dépasser le simple hommage pour construire un univers finalement assez personnel et une belle pièce de musique qu’on vit plus qu’on écoute. Placez un casque sur vos oreilles, fermez les yeux et laissez-vous embarquer, vous verrez l’effet est saisissant. Je ne vais pas paraphraser la prose de mon confrère reptilien, mais l’idée est la même.
<Ö> convie aussi John Murphy, compositeur de « 28 Jours Plus Tard » entre autres, à la fête de par son utilisation de petite nappes de guitares électriques reléguées en arrière-plan sonore pour venir habiller le son et donner une vraie impression de danger sous une ambiance avant tout atmosphérique et planante qui évoque le travail de Nick Cave sur l’excellent western qu’est « La Proposition » ou celui de Johnny Greenwood (du groupe Radiohead) sur « There Will Be Blood » le chef-d’œuvre de P.T Anderson. On pense parfois aux velléités expérimentales de Gyorgy Ligeti aussi. C’est dans toutes ces eaux cinéphagiques que navigue <Ö>, qui mêle tout cela avec une facilité et un sens de la musique indéniable. Car une des forces de Okul est de toujours apporter une sensation de danger latent et de menace imminente dans un univers a priori calme, planant et contemplatif, créant ainsi chez l’auditeur un malaise palpable et indéfinissable. La musique d'<Ö> fait penser à plein d'autres choses encore mais assez de name dropping comme ça. Écoutez et faites-vous votre propre idée, les amateurs de la frange la plus planante du post rock ne seront pas déçus du voyage.
<Ö>, les cinéphages savent pourquoi.
Rédigé par : Cobra Commander On Fire | 15/20 | Nb de lectures : 12280